Idée reçue N°54 : « La cuve de l’EPR n’est pas la plus sûre du monde car l’ASN a émis un doute… »

Extrait de la newsletter de Ecologie Radicale Information.

(ANNEXE 1 : Et voir en fin de post : lettre d’André Pellen au Premier Ministre et à P.F. Chevet, président de l’ASN.

Lien cloud direct ici :

https://share.orange.fr/#RaENAdnzyS108ed8fff1 )

(ANNEXE 2 : Communiqué de l’ONG « Sauvons Le Climat » :

19 réacteurs électronucléaires à l’arrêt

Peser les différents risques de façon équilibrée

https://sauvonsleclimat.org/19-reacteurs-electronucleaires-a-l%25E2%2580%2599arret/35-fparticles/1936-19-reacteurs-electronucleaires-a-l%25E2%2580%2599arret.html

(ANNEXE 3 : #UARGA Un point sur les « Equipements sous pression (Cuve et générateurs de vapeur) » 8 novembre 2016 : https://t.co/NPmoyh545C )

(ANNEXE 4 : Synthèse de la SFEN le 01/11/2016 : http://www.sfen.org/fr/rgn/surete-nucleaire-un-audit-qualite-de-grande-ampleur-des-equipements-sous-pression)

(ANNEXE 5 : BILLET DE BLOG

EDF aussi doit savoir résister aux « pressions » de l’ASN, pour l’intérêt général, à iso sécurité.

https://t.co/remjMVOwyb )

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Titre de la newsletter :

« La cuve et les Générateurs de vapeur de Flamanville »

(commentaire et éclaircissements  par Maurice Mazière, ancien Directeur du CEA-Cadarache, Président du Groupe de Réflexion sur l’Energie au 21ème siècle -GR21. 

  

Maurice Mazière donne quelques indications sur les arrêts récents de quelques réacteurs du parc, dont la presse s’est faite l’écho.  A ce jour, il apparaît que la cuve présente des caractéristiques mécaniques suffisantes compte tenu de l’irradiation qu’elle subit.                    

Les problèmes concernent surtout le couvercle de la cuve. les contrôles par US (Ultra Sons) sont déjà faits sur 6 réacteurs, pour lesquels l’ASN a donné son accord de redémarrage. 

Le point de départ de cette affaire, ce sont les problèmes rencontrés sur la cuve, le couvercle et le fond de cuve du réacteur de Flamanville 3.   A ce sujet, un  exposé détaillé de Dominique VIGNON en juin 2015,  rappelait le décret ESPN de 2005, devant s’appliquer à partir de  2015, et comportant un certain nombre de critères métallurgiques précis, comme la teneur en carbone du matériau utilisé (< 0,2%) et la valeur de l’énergie de rupture par choc sur éprouvette à 0°C supérieure à 60 Joules (test de résilience). Avec ces valeurs, en cas de « choc froid » résultant d’une injection de sûreté par exemple, l’acier de la cuve reste dans le domaine ductile malgré le déplacement de la température de transition (dû à l’irradiation) vers des températures plus hautes. 

Certaines valeurs relevées sur les éprouvettes de l’acier utilisé pour la cuve de Flamanville ne respectant pas ces critères, l’ASN a demandé, en son temps, des justifications à EDF et AREVA. À ce stade on peut être optimiste pour la virole de la cuve qui présente des caractéristiques mécaniques suffisantes compte tenu de l’irradiation qu’elle subit. 

Les problèmes concernent surtout le couvercle de la cuve qui est un équipement plus complexe avec toutes ses traversées. Sur cet équipement un nouveau programme de qualification est lancé par EDF et AREVA, avec deux couvercles sacrificiels qui sont découpés en un grand nombre d’échantillons représentatifs des différentes zones, sur lesquels des tests de résilience sont effectués sous le contrôle de l’ASN. Cela représente un travail énorme, sur plus d’un millier d’éprouvettes, qui va durer jusqu’à fin 2017. Le Groupe Permanent ESPN se réunit régulièrement pour examiner ces résultats au fur et à mesure de leur édition, et  les premiers résultats obtenus sont plutôt encourageants. 

À la suite de ces problèmes, il y a eu un audit chez AREVA qui a montré quelques écarts dans la fabrication des équipements primaires. Cela concerne, notamment, une teneur en carbone supérieure à 0,2% dans les aciers utilisés pour un certain nombre d’équipements du parc en exploitation actuel. Or la teneur en carbone favorise la fragilisation de l’alliage. 

Les pièces impliquées sont en particulier les parties basses des GV (où sont piquées les branches chaudes et froides). EDF s’est engagé à faire des vérifications sur ces pièces (contrôles par ultrasons) pour s’assurer qu’il n’y a ni fissuration, ni amorce de fissuration. Mais sur ces pièces il n’y a pas d’irradiation comme sur la cuve et le problème du déplacement de la température de transition ne se pose pas. EDF a commencé ces vérifications dont les résultats sont soumis à l’ASN. 

Sur une première liste de 13 réacteurs, les contrôles par US (Ultra Sons) sont déjà faits sur 6 réacteurs, pour lesquels l’ASN a donné son accord de redémarrage. Récemment une liste de 5 réacteurs supplémentaires à contrôler dans les trois mois a été établie, EDF envisage d’effectuer ces contrôles avant la période hivernale. Tout cela donne évidemment lieu à diverses interprétations dans la presse qui ne se prive pas de titres alarmistes. Le site de l’ASN donne toutes les informations utiles sur cette question. 


ANNEXE :

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https://share.orange.fr/#RaENAdnzyS108ed8fff1

Monsieur André PELLEN

Président du Collectif pour le Contrôle des Risques Radioactifs – Toulon

755, chemin des folies, quartier Cabaudran

83330 LE BEAUSSET

Courriel : apellen@sfr.fr

Mobile : 06 24 07 63 05

Monsieur Pierre-Franck CHEVET

Président de l’Autorité de Sûreté Nucléaire

15 rue Louis Lejeune

CS 70013

92541 MONTROUGE Cedex

Copie à Monsieur Manuel VALLS

Premier Ministre

Hôtel Matignon 75700 PARIS

Le Beausset, le 6 novembre 2016

Objet : des intérêts socio économiques vitaux délibérément mis en péril

Monsieur,

Ces derniers mois, l’autorité de sûreté nucléaire française donne au monde le stupéfiant spectacle d’une activité supra gouvernementale dont aucune autorité ne semble plus en mesure de censurer les initiatives, dès lors qu’elles sont suffisamment médiatisées et sanctuarisées par l’OPECST, tandis que toute expertise visant à en contester les justifications n’est désormais plus recevable par la tutelle politique.

Ainsi en est-il de la déstabilisation d’une industrie nationale vitale, dont tout porte à croire qu’elle est délibérément mise en œuvre suivant deux méthodes : la prescription intégriste d’un idéal normatif issu d’une doctrine règlementaire qui, pour être la plus exigeante, ne prétend pas moins s’affranchir d’un retour d’expérience planétaire de quelque 15000 années.réacteurs; la normalisation rétrospective de la doctrine en vigueur et de la jurisprudence associée, consistant à perquisitionner tous azimuts l’archive industrielle, afin d’en exhumer des déviations d’assurance qualité vieilles de 40 ans, obliger la ou les entreprises concernées à en répondre, fût-ce pénalement, et asseoir définitivement la souveraineté absolue du contrôle ASN sur la disponibilité du parc électronucléaire d’EDF.

L’an dernier, les manœuvres déployées par l’ASN, suivant la première méthode, avaient suscité le tollé d’un collectif de vétérans du nucléaire émus de voir le chantier de l’EPR Flamanville en faire gravement et arbitrairement les frais. Plusieurs membres de ce collectif s’étaient sentis moralement tenus de mettre en demeure le président de la gendarmerie nucléaire de justifier techniquement, règlementairement et même politiquement la brutale interruption du montage de la cuve du réacteur, décrétée sur les conseils de l’IRSN.

Ainsi, en mai 2015, un même courrier déroulant un questionnaire technique précis, vous fut-il adressé, monsieur le président, par plusieurs de ces vétérans, dont certains eurent autrefois d’éminentes responsabilités. Bien leur prit de saisir le Premier Ministre, divers organismes spécialisés et la presse de ce courrier, car la spontanéité et l’empressement de service public ne furent pas les qualités premières de votre réponse. Si vous condescendîtes néanmoins à nous l’envoyer, le fait de vous y approprier implicitement la totalité des prérogatives relevant de l’article L.592-1, ci-après, du code de l’environnement, ne témoigne pas moins d’une rare suffisance et de l’impunité dont vous jouissez à continuer de confondre au quotidien communication et information : « L’autorité de sûreté nucléaire est une autorité administrative indépendante qui participe au contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection ainsi qu’à l’information du public dans ces domaines. »

Quoi qu’il en soit, les justifications techniques que vous avez apportées à ce questionnement sont une injure à un concept ALARA faisant pourtant autorité dans les domaines de la radioprotection et de l’environnement nucléaire. L’intransigeance dont vos réponses sont empreintes exprime, en effet, que le président de l’ASN ne saurait assujettir une quelconque prescription ESPN aux limites de ce qu’il est raisonnablement possible de faire en métallurgie et en constructions mécaniques, dans le secteur industriel très spécifique de la fabrication et de l’aménagement des gros composants nucléaires. Je ne veux pour illustration d’un tel abus de prérogatives que ce qui suit et qui, une nouvelle fois, suggère quelques questions auxquelles mes amis et moi vous demandons expressément de bien vouloir répondre, conformément à la vocation statutaire de votre fonction, rappelée par l’article L.592-1. 

S’agissant de la performance à 60 joules et 0°C du test de Charpy, sur un échantillon de forgeage, pourquoi n’avez-vous pas largement rendu public que cette performance fut observée pour la toute première fois aux forges d’Areva-Le-Creusot, lors de la mise au point d’un processus métallurgique inédit, tendant à améliorer les caractéristiques mécaniques du matériau ?

Pourquoi n’avez-vous pas largement rendu public que, sans même prendre la peine de laisser le temps à Areva de s’assurer de la reproductibilité systématique et en toute circonstance de cette performance, l’ASN s’est empressée d’en faire une norme implacable ?

Aussi, sur quelle expertise métallurgique, distincte ou contradictoire de celle d’Areva, l’ASN s’appuie-t-elle pour décréter non conforme, sans la moindre tolérance, la série de tests ayant affiché un résultat moyen de 52 joules et pour conclure à une responsabilité rédhibitoire de la teneur en carbone relevée ponctuellement à 0,30 %, dans quelques zones très réduites et peu sollicitées en exploitation, pour une prescription à 0,22 % dont on se demande quels arguments théoriques de dimensionnement et de retour d’expérience la justifie?

Comment se fait-il, par ailleurs, que l’ASN ne tienne aucun compte de la réalité des ségrégations naturellement présentes au sein de tous les lingots de cette taille, dont je ne veux pour preuve de l’existence que celles observées sur les lingots fournis par JCFC (Japan Casting Forgin Corporation) ? En conséquence, pourquoi une pénalisation aussi sévère du seul Creusot-Forge ?

Au demeurant, si ce dernier n’avait pas lancé par anticipation la fabrication des pièces destinées au projet EPR américain avorté, comment l’ASN se serait-elle procurée ses éprouvettes de résilience, prises “au niveau du quart-épaisseur supérieur, mi-épaisseur et à trois quart-épaisseur”, sur le couvercle et sur le fond de cuve, sans être obligée de faire fabriquer de coûteuses pièces sacrificielles et en ignorant les zones de recette, en bordure de bol, qui ont toutes donné de bons résultats ?

Pour clore ce chapitre de la disqualification métallurgique alléguée des couvercle et fond de cuve, outre la mauvaise foi dont vous faites preuve à prendre convenablement en compte l’antériorité de leur fabrication à la promulgation des normes ESPN et aux résultats conformes des recettes contractuelles, se pose maintenant la question du bilan des essais destructifs complémentaires, fortement suggérés à Areva et à EDF, voilà près de deux ans maintenant.

À l’heure qu’il est, vous ne pouvez pas ne pas déjà détenir une collection de résultats, suffisante à faire significativement émerger la tendance globale vers laquelle s’achemine cette campagne. En conséquence, combien d’éprouvettes avez-vous jugé nécessaire de sacrifier pour mener à bien cette dernière et combien d’entre elles ont révélé des résultats hors critères ou jugés par vous rédhibitoires ?

Ne trouvez-vous pas suspect qu’il faille encore 6 mois à vos spécialistes, pour se prononcer sur des résultats à disposition, alors qu’il est très probable que vous sachiez déjà de quoi il retourne, si l’on en croit les récentes déclarations on ne peut plus optimistes d’Areva et d’EDF, devant l’OPECST ?

Venons en maintenant à la deuxième méthode de déstabilisation de notre industrie électro nucléaire, avec laquelle vous venez de défrayer bruyamment la chronique. Mes amis et moi pensons que, non seulement vous avez commis là l’excursion de trop, sur le territoire socio économique du pays, mais que, de surcroît, vous vous êtes fait le complice d’une intolérable manipulation de l’opinion. Comment, en effet, pouvez-vous laisser se propager la confusion ci-après, entre le motif de l’ukase signifiée à EDF, sur les conclusions de l’insolite opération d’archéologie documentaire menée dans les archives d’Areva, et celui de la sanction imposée au montage de la cuve de Flamanville, sur la base de contrôles métallurgiques effectifs : 

«…Le fond de certains générateurs présente, en effet, des concentrations (« ségrégations ») excessives de carbone susceptibles d’en fragiliser l’acier. Soumis à des pressions et des températures élevées, cet échangeur thermique qui produit la vapeur envoyée dans le turbo-alternateur générant l’électricité doit être à toute épreuve – même s’il est moins sollicité que la cuve où se produit la fission des atomes. Ce défaut de ségrégation avait d’abord été mis en évidence sur la cuve de l’EPR de Flamanville (Manche), forgée par Areva dans son usine de Creusot Forge (Saône-et-Loire). Cette découverte avait conduit l’ASN à exiger d’autres contrôles, sur les réacteurs en service cette fois. » – Le Monde Économie du 18/10/2016. » ?

Ainsi, après 35 ans d’exploitation soutenues, soupçonneriez-vous les générateurs de vapeur de 5 tranches nucléaires d’être potentiellement le siège d’un accident gravissime… imminent, au seul motif que des dossiers de fabrication et de qualification ont été découverts raturés, surchargés, falsifiés ou incomplets et après que 13 autres tranches de tous paliers soient retournées sur le réseau ou soient sur le point de l’être, vos contrôles imposés s’y étant révélés négatifs…

Ainsi, faudrait-il se faire une raison à ce que le caractère rétroactif de la norme ESPN soit définitivement entériné, alors qu’il fut fortement question de l’amender ultérieurement, pour tenir compte précisément des réalités industrielles et pour limiter des risques induits de surcoûts et de retards de planning pouvant se révéler considérables… 

Ainsi, faudrait-il même se faire une raison à ce que les tribunaux soient désormais mis à contribution pour identifier formellement les hérésies anciennes et aller jusqu’à en sanctionner les responsables ! 

Mais que ne s’est-il encore trouvé quelqu’un, parmi votre tutelle politique, pour s’insurger contre un déterminisme aussi surréaliste, voire aussi suicidaire, auquel votre aveuglement ne sait plus mettre de limites ! Avez-vous une petite idée des immenses préjudices de toute nature qu’un black-out de quelques heures seulement pourrait causer à la société moderne du tout électrique ?…

Black-out dont on a estimé qu’il pourrait coûter le prix de plusieurs EPR à une Union Européenne privée de courant pendant à peine deux jours…

Black-out dont Ségolène Royal, qui n’est plus à une contradiction ni à une ignorance près, n’a pas craint d’intimer à EDF d’en prémunir le pays ! Peut-être pourriez-vous souffler à votre sémillante ministre que, depuis plusieurs années déjà, non seulement EDF n’est plus qu’un producteur d’électricité comme les autres, mais qu’elle pourrait être bientôt plus fragile qu’eux (Les arrêts de réacteurs vont coûter 1 milliard d’euros à EDF en 2016 – http://www.lesechos.fr/industrie-services/energie-environnement/0211463147548-nucleaire-les-arrets-de-reacteurs-vont-couter-1-milliard-deuros-a-edf-en-2016-2040573.php), voire être à terme leur victime ; lui souffler également que la responsabilité de la continuité du service, prêtée à l’opérateur historique, incombe désormais exclusivement à RTE…

Bref, dans une indifférence générale bercée par les idéalismes les plus stériles, l’abdication de pans entiers de l’autorité régalienne de l’État se révèle aujourd’hui patente. Aussi, à la veille d’un rendez-vous institutionnel crucial pour la Nation, y avait-il urgence à ce qu’une vive protestation rompe la veulerie ambiante, pour dénoncer la ruineuse dérive des affaires socio économiques du pays, portée en germe par tous les errements qui accablent sa politique électro énergétique. Une fois encore, la protestation émane de ces nucléocrates réactionnaires dont vous pouvez chaque jour mesurer le pouvoir de nuisance sur la conquête éolienne et photovoltaïque de notre environnement.

Aussi, comme l’an dernier, la présente lettre ouverte vous est-elle adressée au nom de ce collectif informel de vétérans et de sympathisants du nucléaire, dont certains se déclareront solidaires des propos, directement à vous et au Premier Ministre, afin de donner à la démarche la force d’une pétition. Il va de soi que, comme l’an dernier également, les parlementaires et la presse en auront une copie… mais aussi les candidats à l’élection présidentielle.

Je vous prie d’agréer, monsieur, l’expression de mes salutations distinguées.

André Pellen, président du CCRR de Toulon, s’exprimant à titre purement personnel.

 

par nikopol92

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